L’évêque de mer (bishop fish) — historique et iconographiell
Texte historique & iconographie — sources principales : Conrad Gesner (Historiae Animalium), Ulisse Aldrovandi (Monstrorum Historia) et collections d’images publiques (Wikimedia Commons, Internet Archive).
1. L’évêque de mer, entre mythe marin et curiosité savante
Aux XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, l’imaginaire européen fut largement alimenté par des récits de créatures marines extraordinaires — sirènes, moines de mer (sea monk) et l’énigmatique évêque de mer (bishop fish). La figure du bishop fish apparaît dans des récits de pêcheurs et des recueils naturalistes : l’un des récits les plus célèbres rapporte qu’un spécimen aurait été exhibé devant le roi de Pologne et qu’il aurait fait le signe de la croix avant de regagner la mer.
La description la plus diffusée figure dans la Historiae Animalium de Conrad Gesner (édition du milieu du XVIᵉ siècle), où un témoignage rapporte la capture d’un « poisson-évêque » et sa présentation à des prélats. Gesner le mentionne et publie des gravures associées à ces récits.

Ulisse Aldrovandi, dans son imposant Monstrorum Historia, reprend la légende et propose une iconographie voisine, en insérant l’évêque de mer dans une galerie de « monstres » marins exploités à la fois comme curiosités et comme figures d’enseignement moral ou scientifique. Ces recueils mêlaient témoignages, textes antiques et interprétations — la frontière entre observation empirique et merveilleux restait alors poreuse.
2. Contexte intellectuel et interprétations
À la Renaissance, la compilation encyclopédique du vivant cherchait à ne rien omettre : on consignait donc aussi bien les animaux authentifiés que des récits de prodiges. Les « monstres marins » occupent une place particulière, car la mer était considérée comme un domaine d’étrangeté où la Providence pouvait manifester des signes. Des naturalistes comme Gesner ou Aldrovandi cataloguaient ces rapports, parfois en les notant comme douteux ou rapportés, parfois en les illustrant sans jugement tranché.
3. Hypothèses modernes
Les spécialistes modernes considèrent le bishop fish comme une créature légendaire — résultant soit d’une méprise (poisson-lune, raie, requin-ange, ou calamité d’un spécimen mutilé), soit d’une exagération populaire ensuite relayée par des compilateurs savants. Plusieurs explications ont été avancées (méprise avec Mola mola, angelshark Squatina, ou restes d’un grand calmars / jenny-iver / « strange carcass »).
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4. Iconographie commentée (observations)
Conrad Gesner — Historiae Animalium (1551 et éditions ultérieures)
Description visuelle : les planches associent une forme humanoïde à des éléments pisciformes : tête coiffée d’un élément évoquant une mitre, nageoires disposées comme des manches, corps allongé en queue. Dans plusieurs exemplaires et réimpressions, ces images circulent et se déclinent sous forme de planches séparées. Gesner, dans ses notices, cite le témoignage sans toujours l’affirmer comme observation personnelle.
Ulisse Aldrovandi — Monstrorum Historia (1642)
Description visuelle : Aldrovandi reprend la figure en la rattachant à une galerie de monstres et prodiges. L’iconographie chez Aldrovandi montre souvent la créature « debout », évoquant davantage une procession ecclésiastique miniature que l’apparence d’un poisson ordinaire, ce qui renforce l’effet de « métaphore » entre monde marin et société terrestre.

5. Conclusion
Le bishop fish demeure un exemple emblématique de la façon dont récits populaires, témoins marins et ambitions encyclopédiques se rencontrèrent à la Renaissance. Plus qu’un animal identifié, il témoigne d’une méthode — alors naissante — : rassembler tous les récits connus, les illustrer, puis, progressivement, essayer de hiérarchiser les preuves. Aujourd’hui, la meilleure lecture reste historique et iconographique : ces images racontent autant la culture visuelle du temps que l’histoire naturelle elle-même.
Sources principales accessibles en ligne :
- Gesner, Historiae Animalium (édition numérisée) — Internet Archive / scans. :contentReference[oaicite:10]{index=10}
- Aldrovandi, Monstrorum Historia — notices et reproductions d’estampes. :contentReference[oaicite:11]{index=11}
- Collections d’images et gravures (Wikimedia Commons) — planches « Sea bishop », « Sea monk », et feuilles scannées. :contentReference[oaicite:12]{index=12}
- Article de synthèse / notice encyclopédique (Wikipedia : « Bishop-fish ») pour la trame de la légende. :contentReference[oaicite:13]{index=13}

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